ICI ET LÀ

Remontons un peu dans le temps… Nous sommes le 31 décembre 1687. Le Zoorschoten quitte le port hollandais d’Amsterdam. A son bord, une poignée de Huguenots d’origine française, persécutés après la révocation de l’édit de Nantes, tente de rejoindre l’Afrique du Sud. Trois mois après, les survivants s’installent. Franschhoek ou « le coin des Français » est en train de naître.

Mais revenons à nos jours…Depuis belle lurette, ici, plus personne ne parle français. Pourtant les vignobles s’appellent « Mont Rochelle », « Haut Espoir » ou « La Motte »,  les restaurants « Le Bon vivant » ou « Café des Arts ». Les Leclerc sont devenus les De Klerk, mais le 14 juillet on célèbre le « Bastille Day ». La ville se pare des couleurs françaises plus pour attirer le touriste que par souci historique…

Dans un cadre magnifique, où les vignobles empiètent sur les collines qui, à leur tour, cèdent leur place aux pics qui se découpent dans le ciel, Franschhoek vit pour et par le tourisme. Nous venons de quitter  « Le Petit Bijou« , un charmant appartement qui nous héberge pendant deux nuits, pour nous installer sur la terrasse d’un café au nom bien de chez nous, évidemment, le « French Bistro ». La petite ville est en train de se réveiller, les boutiques ouvrent leur porte, les badauds s’attardent dans les ruelles qui s’animent pour une nouvelle journée de plaisir et de découvertes. Nous venons de demander des jus d’orange qui ne figurent pas sur la carte. Qu’importe. La serveuse file au supermarché le plus proche et elle en ressort avec nos oranges… Qui dit mieux ?

Il fait bon de paresser ici. Et, si une petite soif devait vous prendre, faites comme nous. Les vignobles vous attendent. Nous sommes désormais installés autour d’une table à la « Grande Provence » sur une terrasse qui nous tendait la main après avoir traversé des vignes sans fin…

 

Petits fromages locaux accompagnés de quelques crus du coin. Le Chenin blanc barriqué est loin d’être désagréable, ma foi, surtout lorsqu’il est servi avec le sourire et la gentillesse d’un personnel enthousiaste.

C’est bien connu. L’apéritif aiguise l’appétit. En route pour un bon restaurant. Pas difficile. Le coin est réputé pour être le berceau de la gastronomie sud-africaine. Ce sera le « Hussar Grill« , à l’hôtel Marriot du coin. Une simple soupe de tomates, spécialité de l’établissement dont la recette est secrètement gardée, mais mes papilles gustatives en frémissent encore aujourd’hui. Crevettes, foie de volaille et salade grecque rivalisent entres elles. Les viandes sont succulentes et bien assaisonnées. Une excellente adresse, tout comme, dans une autre vie, un autre restaurant, le « French Connection« , sorte d’ancienne brasserie à l’ambiance informelle. Encore une fois, la seule concession à son nom, c’est le champagne et c’est sûrement ce qui était le moins réussi du repas.

Il faut bon de paresser à Franschhoek… Et ce n’est pas tout. La ville n’est pas trop loin du West Coast National Park. Un endroit que vous connaissez déjà, fidèles lecteurs, mais que nous avons envie de retrouver. Ses dunes, ses vagues, ses oiseaux et peut-être des restes de la floraison d’août…

Une heure et demie de route plus tard, à vive allure, et nous voilà sur place. Un premier arrêt. Mes jumelles scrutent l’horizon, à la recherche du kudu que nous avions aperçu içi même il y a deux ans. Il n’est plus là.

Ces dames se promènent dans les dunes, attirées par les roses et les mauves des quelques fleurs pas encore fanées.

-Sophie, fais attention quand-même. Regarde où tu mets les pieds. Il y a des serpents dangereux dans le parc- m’exclame-je.

-Ah, bon. Tu crois ?- me répond-t-elle.

Quelques minutes plus tard, nous roulons. Un coup de frein soudain.

-C’est quoi, ce truc brun sur la route ? – demande Christian.

-Je n’en sais rien. Je n’ai pas vu. Reviens en arrière- lui suggère-je.

C’est vite fait. Pendant quelques courts instants, nous parvenons à admirer un superbe exemplaire de vipère heurtante. Son venin est mortel et elle peut être assez agressive. Bien entendu, Christine descend de la voiture, son appareil à la main et je l’engueule. Bien entendu, en vain…

       
Shadow
       

Heureusement, la vipère s’en va, rapide comme seul un serpent sait l’être. Seule Sophie est parvenue à le photographier. Son chef d’oeuvre à elle ? Allez le voir sous la rubrique « La parole à nos amis ». Ou alors, contentez-vous d’une image volée sur le web..

West Coast n’a guère changé… Des vastes étendues ondulées de végétation recouvrant des dunes dont la blancheur refait de temps en temps surface, déchirant le paysage. La mer qui nous tend les bras à l’horizon. Un damalisque à front blanc couché dans le tapis violet des fleurs par ici, une gazelle de Thompson un peu plus loin.

Mais je les regarde à peine. J’ai hâte de rejoindre Tsaarbank, au nord du parc et ses vagues majestueuses qui tant m’avaient séduit.

               

   

 Le vent a presque disparu, la marée en fait des siennes et la mer se concède une pause. Qu’importe ! Des huitriers de Moquin prennent le relais.

                         

Pas de déferlantes, mais des oiseaux. Tout d’abord dans les jumelles, comme ce flamand que s’isole dans la baie…

                         

…puis des dizaines et des dizaines de bécasseaux, difficiles à identifier dans le contre-jour, probablement des minutes et d’autres aussi, des échasses blanches et une aigrette garzette. Les flamants, quant à eux, se tiennent à distance…

   

                             

Un joli tableau de chasse pour terminer un voyage.