C’est notre dernier safari à Phinda. Nous aurions bien voulu y rester un jour de plus, mais il n’y avait plus de place pour tout le monde. Tant pis, le petit avion pour Exeter nous attend à 1030 heures.
Profitons de ces derniers instants. Nous surprenons cinq zèbres sur la piste. Qui a donc la priorité ? Le temps de consulter le code de la route, ils ont déjà disparu.
Puis, nous retrouvons nos frères guépards. Incroyable. Ils sont toujours en train de manger. Cette fois-ci c’est plutôt mince. Il ne reste plus grand-chose du minuscule steenbok (raphicère en français…). Cela n’empêche pas deux des trois guépards de se disputer la carcasse : jeu, domination ou hasard ? J’ai remarqué que l’un des frères se tient toujours un peu à l’écart. C’est aussi le cas ce matin.
Nous ne sommes plus seuls. D’autres voitures nous ont rejoints. Un peu plus loin, la pride des lions bouge, suit un troupeau de buffles. Selon les règlements de la réserve, seules trois voitures à la fois peuvent les approcher. Chacun attend son tour.
Lorsque le nôtre arrive enfin, tout s’est calmé. Pas de chasse, hélas. Juste un beau mâle qui entame ses quelques 22 heures de farniente.
Une dernière surprise nous attend : on nous a préparé un somptueux petit-déjeuner dans la brousse. Nous arrosons nos délicieux croquemonsieurs africains (ingénieusement faits cuire dans les braises) avec le champagne offert par Matthew. Nous avons en effet vu et identifié les dix oiseaux stars de la réserve.
Ces petites attentions, certes habitudinaires mais toujours agréables, ainsi qu’évidemment la compétence des guides, font la différence entre un endroit comme Bayethe Lodge et les meilleurs lodges sud-africains. A chacun d’apprécier si la différence de prix est justifiée. J’en suis personnellement convaincu.
Good bye Matthew, Sala kahle Musy. Vous fûtes des guides passionnants et de très agréables compagnons d’aventure.
Une heure et demie de vol plus tard et nous voici à Exeter. Nous devisons avec Blaine, notre futur mentor et son pisteur, Colbert (ça ne s’invente pas…), un Noir à la carrure impressionnante. Comme toujours le lodge est sis à une grosse demi-heure de la piste d’atterrissage, ce qui nous permet de faire connaissance avec notre futur terrain de jeu.
Exeter River est l’un des nombreux lodges de la réserve privée de Sabi Sand. Jouxtant le parc national Kruger, Sabi Sand est certainement le meilleur endroit en Afrique du Sud pour observer la faune africaine. Nous avons déjà visité Mala Mala et Londolozi, dont nous gardons d’excellents souvenirs.
Assis sous un immense arbre à saucisses, en contre-bas du bâtiment principal du lodge, les pieds presque dans la Sand River, nous dégustons notre premier lunch. Exeter River Lodge est composé de 8 chalets. Il est un brin plus luxueux que Forest Mountain Lodge à Phinda et plus intime. Nous sommes seuls pour l’instant. Nous y resterons quatre nuits. Pourvu que ça dure…
Halte aux bavardages. Nous partons en chasse.
Ici, les voitures sont plus modernes et confortables. Même Françoise, la plus dure à la tâche, apprécie pour ses vieux os…
Tous, nous ronronnons. Quelques impalas aux postures peu intéressantes, des « flying bananas » (Calao Leucomèle ou Southern Yellow-billed Hornbill est leur vrai nom) qui nous escortent sur la piste, un magnifique aigle bateleur malheureusement encore une fois en plein contre-jour. Le soleil disparaît et la lumière du crépuscule n’est pas faite pour nous réveiller.
Même les hippopotames nous accueillent avec des énormes bâillements.
Signe prémonitoire d’un safari ennuyeux ? Peut-être pas. Voilà que Blaine quitte la piste et s’enfonce dans la brousse. Buissons après buissons, dépression après dépression, il se fraye difficilement un chemin en direction d’une autre voiture. Et là, c’est l’apothéose : notre cinquième et dernier big five. Qu’écris-je ? Nos cinquièmes et derniers big five, car les léopards sont deux, deux jeunes sœurs âgées d’environ une année.
Tout d’abord, elles nous regardent, surprises de tant d’agitation, puis, agacées, se faufilent dans le taillis, essayant de se débarrasser de tous ces importuns. Elles sont magnifiques. La nuit et les faisceaux des lampes qui les effleurent les rendent encore plus mystérieuses. C’est la première fois que nous voyons de si jeunes léopards.
Nous les suivons un court moment, puis nous renonçons, de peur d’attirer un prédateur. Leur mère n’est pas là pour les défendre, certainement occupée par sa chasse.
La nuit est tombée, mais les appareils modernes font parfois des miracles. Douze-mille huit cent ISO, un trentième de vitesse. Ça aurait pu être pire, n’est-ce-pas ?
Juste un tuyau… Les léopards ont aussi leurs empreintes digitales. Pour les différencier, comptez les points qu’ils ont à côté de leurs narines… Trois pour le premier, côté gauche, et deux pour le deuxième. Il s’agit bel et bien des deux soeurs et non pas du même léopard.
Tous phares éteints, nous attendons le retour de la mère. En vain, elle ne viendra pas.