L’ESTRÉMADURE

 

Vaste communauté autonome, grande comme la Suisse, l’Estrémadure est la patrie de la dehesa, ce terme typiquement espagnol et portugais qui désigne un écosystème dominé par une forêt dégagée, peuplée principalement de chênes verts et de chênes-lièges sur un sol de pâture et d’herbes.

Terre d’élevage, maison du porc ibérique de pure race et du taureau de combat, elle vit aussi de l’exploitation du bois, de la récolte des champignons et du liège et contribue à éviter l’exode rural. Une vraie savane nourricière.

Un paysage d’une une beauté sereine, encadré par un relief montagneux mouvementé et des plaines désertiques, ce qui fait dire à Christine que l’Estrémadure est la plus belle région d’Espagne, sentiment que je ne suis pas loin d’approuver, bien que j’aie beaucoup aimé la Galice.

Côté avifaune, son fleuron est Monfragüe, où nous nous dirigeons. Carmen ne le sait pas encore, mais elle nous attend…

Nous n’avons pas oublié cette dame énergique, fort sympathique et excellente cuisinière qui gère quelques chambres pour touristes dans sa maison chargée d’histoire, Palajo Viejo de las Corchuelas, plongée dans une très grande chêneraie.

 

♥♥♥♥ El Parque Nacional de Monfragüe

 

Ses montagnes couvertes de végétation se précipitant sur les falaises dominant le Tage en font une terre de rapaces.

 

 

Nous sommes au Salto del Gitano. Les grands moments se répètent difficilement. Nous ne verrons pas les vautours fauves planer par dizaines au-dessus de nos têtes, au Castillo de Monfragüe. Question de thermiques, peut-être.

L’endroit reste un coin magnifique. Avez-vous déjà vu l’un des ces oiseaux piquer sur vous pour vous éviter d’un minuscule battement d’ailes ?

 

 

Nous ne sommes pas les seuls à admirer le spectacle.

 

 

Le parc est grand. Nous allons y consacrer deux jours entiers à flâner entre un observatoire et l’autre, à la recherche de l’instant magique où tout s’arrête, face à la beauté animale.

Rencontrer un ou plusieurs cerfs n’est pas rare. Ils sont nombreux ici.

 

 

Pas le lynx ibérique. Et pourtant, l’espace de quelques secondes, nous l’apercevons traverser la route,  avant de disparaître dans la forêt. Les appareils photographiques étaient ailleurs… 

Moment d’émotion, partagé par Carmen lorsque nous lui en faisons part. Une rencontre inattendue et chanceuse.

Terre de rapaces, disions-nous. Le vautour moine est beaucoup plus rare que son confrère. Il y a deux ans, il s’était montré discret et distant. Il n’en va pas de même cette année-ci.

 

 

De retour au Salto del Gitano, de loin l’endroit le plus spectaculaire de Monfragüe, nous nous régalons d’images de vautours fauves qui remplissent les airs. Un observateur nous signal un oiseau solitaire, perché sur un rocher, en haut des falaises.

Habillé de son costume noir, rehaussé par une touche de blanc, il observe d’un air détaché toute l’agitation qui l’entoure.

Enfin un vautour moine à une distance raisonnable. Nous pouvons l’admirer pendant une bonne vingtaine de minutes, avant qu’il ne s’envole.

Les yeux remplis de sa silhouette, nous n’avons aucune difficulté à l’identifier de loin, posé sur un rocher, comme il se doit, alors que nous approchons Portillo del Tiétar, autre observatoire bien placé.

Question de quelques minutes, nous sommes installés, téléobjectifs déployés. Le moindre frémissement de ses plumes déclenche une rafale.

 

 

Le temps nous a semblé s’être arrêté. Pourtant, une heure s’est écoulée.

 

♥ Embalse de Arrocampo

 

Une soixantaine de kilomètres séparent notre logement de Saucedilla, autant dire rien pour deux grands voyageurs.

Autour de la petite ville, s’étend un parc ornithologique assez particulier, munis de six observatoires, Les premiers quatre se visitent à pied, les deux autres sont atteignables en voiture.

 

 

Une fois n’est pas coutume. Le centre d’information s’ouvre à notre arrivée. Une dame nous remet gratuitement la clé pour accéder aux observatoires. Nous n’aurons qu’à la déposer dans une boîte à notre retour.

C’est parti. Et plutôt bien. A peine installés, une loutre montre son museau, avant de plonger dans les eaux du bassin. Nous attendons longtemps qu’elle refasse surface, en vain. Quelques grèbes castagneux nous tiennent compagnie.

 

 

La suite est moins alléchante. Le soleil brille, mais c’est une journée très venteuse, ce qui n’est jamais bon pour l’observation. Les autres observatoires sont trop éloignés du plan d’eau. Goélands, mouettes rieuses, deux aigrettes garzettes.

Nous parvenons néanmoins à voler quelques images en nous promenant ici et là.

 

 

La voiture remplace les jambes. L’observatoire numéro cinq est très pittoresque, dominant une lagune riche en  bancs de sable où se détachent des squelettes d’arbres, perchoirs idéaux. Les bécasseaux et les échassiers abondent. Mais, encore une fois, ils sont trop lointains. Nous ne pouvons que chercher à les identifier avec nos jumelles. Bécassines des marais, chevaliers guignettes, grands gravelots, échasses blanches.

Et un oiseau que nous avons de la peine à identifier tellement il est inattendu. Lui, il est tout proche. Un Torcol fourmilier.

 

 

Un bel endroit, très bien structuré, qui mériterait une autre visite, à une saison différente. Pas idéal pour des photographes, mais certainement intéressant pour les amateurs de la longue-vue.

Ce n’est pas la mangouste d’Egypte qui traverse la route devant la voiture qui nous fera changer d’avis.

 

♥♥ El Monumento natural Los Barruecos

 

Les effleurements granitiques de la plaine où se trouve Càceres ont provoqué, avec le temps, la création de sortes d’îles rocheuses où trouvent refuge la flore et la faune. Los Barrecuos est l’une d’elle.

 

 

Tout semble se liguer pour que nous repartions rapidement une fois arrivés sur place. C’est dimanche, il y a foule, le centre d’information est fermé, les sentiers sont mal indiqués.

Pourtant, dès que nous parvenons enfin au barrage du réservoir, tout change. Le paysage est magnifique. Les blocs de granit érodé qui jonchent le sol prennent toutes les formes possibles, se reflétant parfois dans les eaux du lac. Chênes verts et chênes-lièges éparpillés ici et là se mélangent à une végétation buissonneuse. Un sentier fait le tour du lac et nous éloigne de la foule. Et les oiseaux abondent.

 

 

Et parfois, nous parvenons même à les photographier.

 

♥ Los llanos de Càceres

 

Il faut l’avouer. Nous venons ici dans le but de voir et, si possible, de photographier l’outarde. C’est raté, malgré le long moment passé dans l’observatoire de la Pulgosa. Peut-être ce n’est pas le moment idéal.

 

 

Mais l’approche des lieux censés abriter ce grand oiseau est tout sauf désagréable. Nous traversons tout d’abord un secteur couvert de végétation. Un groupe de perdrix rouges s’affole à notre passage. Le temps de parquer la voiture et elles ont déjà disparu. Nous avions connu des oiseaux moins craintifs.

Puis les plaines sans fin, enfermées dans un carcan de barbelés, magnifiques perchoirs pour les oiseaux. Les poteaux des lignes électriques s’alignent à l’infini. Tous, ou presque tous, sont coiffés d’une espèce de boîte en dur. Les choucas des tours semblent les apprécier particulièrement. Nous nous interrogeons sur leur raison d’être. Christine émet l’hypothèse qu’elles soient des mangeoires, ce qui me semble impossible, vu leur nombre.

 

 

Et pourtant, elle a raison. En regardant nos photos, nous en avons confirmation.

Une fois à droite, une fois à gauche, parfois tout droit. Nous finissons par nous égarer. Une propriété privée nous barre la route.

Demi-tour, vite interrompu. Un groupe de vautours fauves se tient à l’orée d’un bosquet. Il surveille un charnier visiblement vide. Une silhouette m’intrigue. Un vautour moine ?

Et non, c’est un aigle ibérique. J’ai perdu des précieuses secondes pour l’identifier. Il s’envole et je ne suis pas prêt.

Je m’en veux. Même si l’aigle reviendra un peu plus tard. Ma photo n’est pas un chef-d’oeuvre, j’aurais pu faire nettement mieux lorsqu’il était à terre.

 

 

  

                                                              

 

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L’Aragon